Les députés ont adopté, à une quasi-unanimité (428 pour et 1 contre) dans la nuit de mercredi à jeudi, l’amendement au projet de loi sur le pouvoir d’achat prévoyant la déconjugalisation de l’Allocation Adulte Handicapé. Autrement dit, la fin de la prise en compte des revenus du conjoint dans le calcul de cette aide.
Aujourd’hui l’AAH est versée aux personnes dont le handicap rend difficile l’accès au marché du travail. D’un montant de 919,86 euros par mois à taux plein, elle décroît en fonction des revenus du/de la conjoint-e, jusqu’à atteindre 0 si celui-ci gagne plus de 2270 euros mensuels. Une règle qui crée des situations de dépendance économique et accroît le risque de violences conjugales.
Plus de 1,2 million de citoyens bénéficient aujourd’hui de l’AAH, dont 270 000 en couple. Cette demande des militant∙es handicapé∙s d’individualisation de l’AAH est récurrente depuis au moins une décennie. Elle a pris de l’ampleur à l’hiver 2020 et fait depuis l’objet d’une bataille assez inédite.
La réforme devrait bénéficier à 160 000 personnes en couple, qui verraient leur AAH augmenter de 300 euros en moyenne, selon les évaluations de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees).
La rapporteuse du projet de loi sur le pouvoir d’achat, la députée Renaissance Charlotte Parmentier-Lecocq, proposait dans la première version de son texte une entrée en vigueur de cette réforme au 1er janvier 2024. Finalement, le texte commun propose un démarrage au 1er octobre 2023.
Pour Solidaires le gouvernement n’adhère à ce consensus uniquement parce qu’il a été acculé par la mobilisation qui s’est tenue depuis deux ans.
Mais cette déconjugalisation de l’AAH n’aura pas lieu avant le 1er octobre 2023, c’est bien trop tard ! Le sujet a été suffisamment travaillé, ces deux dernières années, pour aboutir à une rédaction qui convienne à tout le monde, on n’a pas besoin d’un an pour le faire. Pourquoi attendre, si ce n’est pour faire des économies ?
L’allocation coûte 11 milliards d’euros par an aux finances publiques, auxquels s’ajouteront entre 560 et 730 millions d’euros – selon les estimations – pour la déconjugalisation. Or, si l’on comprend bien les propos du gouvernement, les député∙es doivent coller à une logique de responsabilité budgétaire. Dès lors, nous redoutons un effet rebond à cette réforme : l’AAH risque d’être beaucoup plus difficile à obtenir. Une crainte alimentée par le rapport de la Cour des comptes sorti en 2019 qui avait appelé à réduire les dépenses liées à l’AAH.
Le montant de l’AAH est en dessous du seuil de pauvreté. Et ce n’est pas la revalorisation de 4% qui va aider les personnes en situation de handicap de sortir de la précarité au vu de l’inflation et de l’augmentation du cout de la vie !