Le scandale ORPEA issu de la publication du livre Les Fossoyeurs de Victor Castanet, poursuit son onde de choc. Il révèle en lumière crue ce que donne la logique du profit d’avides actionnaires opposée à celle du service public rendu dans l’intérêt général. Il rappelle aussi que la perte d’autonomie, ne peut plus être un sujet qu’on réveille de temps à autre, au gré d’échéances électorales : il y a urgence. La perte d’autonomie qui résulte de limitations, intervenues à tout âge, des capacités motrices, mentales, psychiques ou sensorielles, est une question qui intègre aussi celle du handicap. Elle est étroitement liée à la problématique de l’allongement de la durée de vie. Elle exige des solutions de fonds.
Espérance de vie et perte d’autonomie : la nécessité d’un grand service public de l’autonomie
Si l’espérance de vie à la naissance progresse (en 2020 : 85 ans pour les femmes et 79 ans pour les hommes contre 82 ans pour les femmes et 73,5 pour les hommes en 1994, selon la DREES), l’incapacité guette une partie des personnes âgées. Selon l’INSEE, l’espérance de vie à la naissance sans incapacité est, en 2020, de 66 ans pour les femmes et de 65,5 ans pour les hommes. La retraite, on la souhaiterait sans incapacité, mais les faits sont têtus. Il s’agit donc de faire face collectivement au risque de perte d’autonomie, lié à l’accroissement de l’espérance de vie, par la constitution d’un grand service public de l’autonomie, avec socialisation des EHPAD privés, afin de sortir le grand âge de toute logique de recherche de profit. Les EHPAD doivent être dotés d’un personnel formé et correctement rémunéré, et le ratio d’un soignant par résident doit être une règle impérative. A cette fin, 200 000 embauches doivent être réalisées dans les EHPAD. Pour Solidaires, c’est non à la marchandisation du soin, il faut en finir avec le marché de l’or gris ! Ce grand service public de l’autonomie devrait également couvrir l’aide à domicile qui a besoin de 1000 000 embauches.
Financement : quelles ressources ?
- Les solutions du gouvernement en août 2020 : 5me branche et CSG
Le risque dépendance est géré par la 5me branche de la sécurité sociale créée par la loi du 7 août 2020, branche gérée par la CNSA (caisse nationale de solidarité pour l’autonomie).
La CNSA est alimentée de façon très modeste par diverses sources : une cotisation des employeurs publics et privés, la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie (CASA), une contribution des régimes d’assurance maladie et une fraction de CSG. A partir de 2024, 0,15 point du montant de la CSG affectée à la CADES – caisse d’amortissement de la dette sociale - sera transférée à la CNSA. Ces financements sont notoirement insuffisants. La question du financement de la nouvelle 5me branche se pose donc de façon aigue. Pour Solidaires, il eut été préférable de placer la perte d’autonomie au sein de la branche maladie, pour un financement global.
- Aujourd’hui, le gouvernement envisage de compléter le financement de cette branche par le report de l’âge de la retraite à 65 ans
Face au scandale de la maltraitance institutionnelle en EHPAD privé, le gouvernement se trouve acculé à rechercher d’autres moyens de financement de ce risque de plus en plus prégnant. Refusant de mettre en place une véritable source de financement conséquente et pérenne en accroissant les ressources de la branche maladie (augmentation des cotisations patronales ? augmentation de la CSG ?), il part à la recherche d’économies pour financer la perte d’autonomie. Il envisage ainsi un transfert de la branche vieillesse vers la 5me en indiquant que le report de l’âge de la retraite à 65 ans dégagerait des marges de financement pour le risque perte d’autonomie. C’est dire que le report de départ en retraite à 65 ans n’est pas justifié par un quelconque déséquilibre financier de la branche vieillesse ! Les projections du COR (Conseil d’Orientation des Retraites) ont démontré au demeurant qu’il n’y pas de déséquilibre financier de la branche vieillesse à craindre dans les prochaines années. Le report de l’âge de la retraite a seulement pour but d’aller encore plus loin dans la vision ultra-libérale de l’économie que porte le gouvernement, vision fondée sur : faire travailler plus et plus longtemps celles et ceux qui ont un emploi pour maintenir un taux de chômage élevé, et les faire travailler plus pour gagner moins. L’excédent de profits ainsi réalisé remplissant plus sûrement les poches des actionnaires que l’investissement dans l’entreprise.
- Proposition de Solidaires : cotisation sociale sur les dividendes
Pour financer la perte d’autonomie, Solidaires revendique la mise en place d’une cotisation sociale assise sur les dividendes, et autres stock-options, participation et intéressement. Reprenons notre dû, pour une autre répartition des richesses ! C’est la totalité des richesses créées par le travail qui doit être soumise à cotisation.
Pour la transparence : de la démocratie sociale
Pour éviter toute dérive dans le traitement des résidents, les pouvoirs publics doivent assurer un véritable contrôle des EHPAD qu’ils soient publics ou privés.
Au-delà, la situation de maltraitance institutionnelle rencontrée dans les EHPAD doit amener une réflexion sur la démocratie sociale pour un droit de regard dans la gestion des EHPAD Pour Solidaires, ce droit de regard aurait sans doute permis une transparence dans le fonctionnement des EHPAD empêchant de telles dérives mortifères de perdurer dans le temps. Il est plus que temps de lancer un grand débat pour instaurer de la démocratie dans la gestion de ces établissements.