VERITE ET JUSTICE POUR SAKINE, FIDAN ET LEYLA. Dans la rue samedi 7 janvier

Dans la rue samedi 7 janvier, 10h gare du nord à Paris.

Le 09 janvier 2023 marquera les 10 ans de l'assassinat de Sakine Cansiz, Fidan Dogan et Leyla Shaylemez en plein de cœur de Paris par un agent aux liens avérés avec les services secrets turcs.

10 ans de déni de justice pour les familles, 10 ans d'impunité pour les commanditaires de l'assassin, qui décédait quelques jours avant son procès. La France ne se contente pas de fermer les yeux sur ce crime et de refuser la levée du secret défense pourtant demandée par la juge en charge de l’enquête. A plusieurs reprises, Emmanuel Macron a rencontré le Président turc Recep Tayyip Erdogan. Lors de ces rencontres, Macron, tout comme son prédécesseur Hollande, s’est bien gardé d’évoquer le sujet fâcheux du triple assassinat : les intérêts politiques et économiques de la France sont bien supérieurs à la justice. Ainsi la justice belge, dans une enquête sur des projets d'assassinats de militant.e.s kurdes par les mêmes protagonistes que ceux des trois meurtres à Paris, a reproché à la France son manque de collaboration.

Pendant ce temps, le régime d'Erdogan, face à la crise économique de son pays, et en vue des prochaines élections, joue la carte habituelle du nationalisme en tentant de rassembler autour d’un ennemi : les kurdes.

Il accentue la répression contre les forces progressistes en Turquie, notamment contre le HDP, et depuis le 19 novembre, bombarde le Rojava en y détruisant les infrastructures indispensables aux civils et en tentant d'aider les prisonniers de Daech à s'échapper. Il utilise des armes chimiques illégales contre la guérilla kurde en Irak au mépris du droit international...

Pour que justice soit faite il faut également, à l'instar de la cour de cassation belge en février 2020, que le PKK soit retiré de la liste des organisations terroristes, afin que celui-ci soit reconnu internationalement comme un interlocuteur indispensable à une solution politique pour les Kurdes, et que la Turquie ne puisse plus pourchasser les militant.es à l'étranger.

Nos camarades kurdes appellent donc à une mobilisation massive pour la manifestation en hommage aux trois femmes, et contre tous les féminicides le samedi 07 janvier à Paris, à 10h départ de gare du Nord.

Comme l'an passé, Solidaires formera un cortège au sein de la manifestation.

NOS CAMARADES ONT BESOIN DE SOUTIEN !

Les camarades souhaitant participer aux activités du groupe de travail sur le Kurdistan peuvent envoyer un mail à Solidaires via leur syndicat pour être inscrit sur la liste mail.

Un crime d'État en plein Paris

Sakine-Fidan-Leyla

Le mercredi 9 janvier 2013, les militantes kurdes Sakine Cansiz, Fidan Dogan (Rojbîn) et Leyla Saylemez étaient assassinées d’une balle dans la tête, dans les locaux du Centre d’Information du Kurdistan, situés au 147 rue La Fayette, à Paris. Alors que depuis quatre ans la mobilisation ne faiblit pas pour demander Vérité et justice pour ces assassinats, les vrais responsables n'ont jamais été réellement inquiétés. Retour sur l'enquête.

Très rapidement après le 9 janvier, la plupart des journaux français titrent sur l'assassinat en avançant la thèse d'un règlement de compte interne au PKK, ce que contestent très rapidement les organisations kurdes. C'est peu de temps après que l'assassin, Ömer Güney, est arrêté, confondu par les caméras de vidéo- surveillance et par des traces de poudre retrouvées sur son sac.

L'enquête menée par la police française révèle ainsi le parcours de cet homme, issu d'une famille nationaliste turque, ayant réussi à s'infiltrer dans le mouvement kurde, d'où sa présence ce jour dans les locaux du Centre d'Information du Kurdistan.

Un mail, parvenu à la préfecture de Police l'accuse alors d'avoir réalisé cet assassinat sur ordre des services de renseignement turcs, le MIT. Un an après l'assassinat, une bande-son ainsi qu'un document interne au MIT sont révélés. Ces deux documents corroborent la thèse d'un assassinat commandité par le MIT.

Le gouvernement d'Erdogan dément très rapidement toute implication. Il rejette la responsabilité sur les membres du

MIT appartenant à la communauté Fethullah Gülen, cela dans un contexte pré-électoral où les relations entre les deux hommes sont devenues glaciales.

Malgré les demandes répétées du mouvement kurde et des organisations françaises en soutien, les documents des services français n'ont jamais été complètement déclassifiés. Seuls quelques paragraphes dans des notes de plusieurs pages ont été rendus publics. Alors que le parquet de Paris renvoie Ömer Güney devant la Cour d'Assise de Paris, retenant le caractère "terroriste" de l'assassinat, et la présence de commanditaires en Turquie, l'Etat turc a toujours refusé de partager ses informations avec la justice française.

L'enquête a duré deux ans et demi, et le procès a été annoncé pour le 5 décembre 2016, 18 mois plus tard. Il a été repoussé pour le 23 janvier, au prétexte de l'état de santé d'Ömer Güney. Ce procès était l'occasion de prouver enfin l'implication des services de renseignement turcs, même si ceux-ci n'étaient pas jugés en tant que tel. Souffrant d'une tumeur au cerveau, il décède en décembre 2016. La mort du prévenu fait douter de la tenue d'un procès.

Sakine Cansiz : une figure historique du mouvement kurde et du féminisme

Sakine Cansiz était l'une des figures majeures du mouvement kurde. Ayant participé à la fondation du PKK au côté de Abdullah Öcalan, elle a aussi énormément milité pour le mouvement des femmes. Emprisonnée onze ans dans la prison de Diyarbakir, elle a par la suite été à l'origine de la création de plusieurs organisations féminines kurdes et a participé à la mise en place dans le mouvement d'ateliers de « jinéologie » consistant à jeter les bases d’une « Science des femmes » pluridisciplinaire qui analyse de manière concrète le vécu des femmes victimes de violences machistes centrée sur leur expérience personnelle. Réfugiée politique en France depuis 1998, elle continuait à militer en France et en Allemagne pour faire connaître la situation des kurdes en Turquie.