Tunisie-Egypte, deux ans après
14 janvier 2013. Un vent de liberté
Début 2011, les peuples de Tunisie et d’Égypte ont fait la preuve que les mobilisations pouvaient chasser des dictateurs en place depuis des dizaines d’années. Des millions d’hommes et de femmes peuvent maintenant s’exprimer et s’organiser à peu près librement. Depuis deux ans, avec des hauts et des bas, les grèves et les manifestations n’ont pas cessées pour parvenir à réaliser les objectifs de la révolution. Elles se heurtent aux forces rêvant d’un retour aux conditions d’avant 2011.
Le maintien des éléments essentiels des régimes précédents
Dans les deux pays, en effet, l’appareil d’État est resté quasiment intact, à commencer par l’armée, la police et la justice. Le patronat et les propriétaires fonciers ont gardé la quasi-totalité de leurs avoirs.
- En Tunisie, la plus grande partie des biens appartenant aux familles Ben Ali/Trabesli a certes été expropriée, mais le gouvernement actuel les revend aujourd’hui par touches successives, notamment à ses amis du Qatar.
• En Egypte, l’armée continue à posséder un véritable empire économique représentant environ le tiers du PNB.
Les liens de soumissions antérieurs envers les pays dominants subsistent, notamment par le biais de la dette et des accords de libre-échange.
Résultat, sur le plan économique et social, rien n’a changé, et les conditions de vie de la population se sont mêmes aggravées.
La montée en puissance des islamistes
Longtemps réprimés par les dictateurs, l’influence des islamistes a explosé avec la chute de ceux-ci. Résultat, dans les deux pays, ils se retrouvent aujourd’hui au pouvoir.
- Leurs projets sur le plan des libertés individuelles et collectives ne sont pas meilleurs que ceux des anciens dictateurs. Ils veulent en particulier s’en prendre aux droits des femmes, particulièrement en Tunisie où ceux-ci sont de longue date les plus étendus de toute la région.
- Sur le plan économique et social, les gouvernements islamistes se situent dans la continuité des politiques néolibérales suivies par leurs prédécesseurs. Cela leur a valu d’être rapidement lâchés par une partie leur électorat. Face à cela, les islamistes n’hésitent pas à recourir de façon croissante à la force. En Tunisie, par exemple, ils ont attaqué, le 4 décembre, le siège de l’UGTT, qui constitue le principal contre-pouvoir du pays. Il en a résulté une série de grèves régionales massives et de manifestations, ayant failli déboucher sur une générale nationale.
Le rôle incontournable du mouvement social
Les révolutions de 2011 en Tunisie et en Égypte ne sont pas tombées du ciel, de la magie de Facebook ou des télévisions satellitaires. Elles ont fondamentalement reposé sur la convergence des mouvements de la jeunesse et du monde du travail. Ceux-ci n’auraient pas eu lieu sans la détermination de milliers de militant-es syndicaux, politiques, féministes et associatifs qui, pendant des années, ont continué à lutter, et dont beaucoup ont connu la prison, la torture, la mort ou l’exil.
C’est sur l’ensemble de ces militants, anciens ou plus récents, que repose aujourd’hui la poursuite du processus révolutionnaire.
Suivant les sujets, les forces auxquelles s’opposent les mobilisations ne sont pas exactement les mêmes :
► En ce qui concerne les libertés démocratiques, à commencer par la défense des droits des femmes, les mobilisations ont lieu avant tout contre ceux qui rêvent d’instaurer un ordre religieux (ont été également visés les militaires égyptiens pendant la période où ils ont été au pouvoir) ;
► Sur le plan économique et social, la bataille se mène principalement contre tous ceux qui se situent dans la poursuite de l’ordre capitaliste libéral, qu’ils soient islamistes, ou issus des dictatures précédentes.
Article emprunté au Site de Solidaires International :
https://orta.pagesperso-orange.fr/solidint/tunisie/article-solidaires-tunisie-14-01-2013.htm
Article publié le 14 janvier 2013