Dans son projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), le gouvernement a beau parler prévention, accès à la santé, aide à l’autonomie des personnes âgées ou en situation de handicap, force est de constater qu’au final tout cela n’est qu’enfumage pour tenter de masquer sa véritable politique : réduire coûte que coûte les dépenses de la sécurité sociale, soit ce qu’il appelle la baisse du « déficit ».
Comment peut-on faire confiance à un gouvernement qui n’augmente l’ONDAM (Objectif National des Dépenses d’Assurance Maladie) que de 3,7 % soit moins que l’inflation ! Même la Fédération Hospitalière de France indique que « les crédits ajoutés à l’ONDAM ne compensent pas intégralement l’inflation et qu’aucun financement ne semble prévu pour couvrir les nécessaires revalorisations (…) décidées cet été ou intervenues pendant les vagues COVID ». De plus, le gouvernement a déjà annoncé qu’il serrerait la vis pour les années à venir.
La prévention : bien belle idée mais avec quels moyens ?
Si on ne peut que se féliciter que le PLFSS évoque la prévention, celle-ci reste limitée à une simple consultation à 3 périodes de la vie ou à la prise en charge à 100 % de la contraception d’urgence. Rien n’est prévu pour faire de la prévention un vrai enjeu de la politique de santé. Peu de moyens sont mis en place pour permettre réellement l’accès à ces consultations pour les personnes éloignées du système de soins ou dépourvues de médecin traitant (près de 10 % de la population serait sans médecin traitant).
Améliorer l’accès aux soins mais…sans moyens !
En fait, cela se limite à « capitaliser sur les mesures prises cet été » en jargon très politique. Autant dire que l’accès aux soins et aux urgences va être toujours aussi compliqué et que les personnels des hôpitaux vont continuer de souffrir !
Et la seule réponse pour les 6 millions d’assuré-es sans médecin traitant est l’allongement des études des futurs médecins généralistes pour les envoyer en stage dans les déserts médicaux ou la pratique de la téléconsultation ! Pour rappel, maintenir le nombre actuel de médecins en remplaçant les départs en retraite nécessite 12 000 formations par an, soit 4 000 de plus que ce qui est prévu.
Politique familiale : beaucoup de poudre aux yeux !
S’il est prévu quelques mesures en faveur des familles monoparentales, la grande “innovation” réside dans la “simplification” des indemnités journalières maternité en mettant progressivement en place la subrogation avec en contrepartie un paiement rapide à l’employeur par les CPAM. Mais pour que cela marche, il faudrait donner des moyens aux CPAM pour qu’elles puissent verser les dites indemnités journalières dans des délais « raisonnables » alors qu’aujourd’hui ces organismes sont au bord de l’asphyxie et les versent avec plusieurs mois de retard. Et pendant ce temps là, le gouvernement continue de supprimer des effectifs des organismes de sécurité sociale.
Cerise sur le gâteau des économies budgétaires, le gouvernement va transférer le financement d’une partie des indemnités journalières maternité (2 milliards € en 2023) vers la branche famille !
L’autonomie à la traîne : quelques mesurettes
Le gouvernement est très fort dans les beaux discours : « construire la société du bien vieillir chez soi », « ajouter du lien social jusqu’à 2h par semaine (mais dans la limite de 52 h par an) » « faire des EHPAD des lieux de vie plus sûrs et plus médicalisés », « bâtir une société plus inclusive pour les personnes en situation de handicap ».
Dans la réalité, la loi « grand âge », annoncée régulièrement, n’est toujours pas en vue.
Au-delà des belles phrases, on cherche vainement les moyens. Le financement de la branche autonomie sera revalorisé de 5,3 % soit moins que l’inflation (6,2 % sur un an), ce qui veut dire qu’il n’y aura pas de réels nouveaux financements.
Le gouvernement parle d’embaucher 3 000 infirmières et aides-soignantes supplémentaires dans les établissements, soit très très loin des besoins ! Sachant qu’ aucune mesure n’est prise pour former et embaucher du personnel. Ou sont d’ailleurs les 50 000 postes promis par Macron durant sa campagne ? Ce sont en réalité 200 000 emplois qui manquent en EHPAD et 100 000 dans le secteur de l’aide à la personne !
Le PLFSS prévoit, suite à l’affaire ORPEA, de contrôler les EHPAD mais ces contrôles seront effectués à moyens constants dans les ARS, qui n’arrivent pas actuellement à endiguer la maltraitance institutionnelle de ces établissements lancés dans une course aux profits effrénée. A quand la constitution d’un grand service public de l’autonomie doté de moyens budgétaires et humains à la hauteur des enjeux ?
Tout ca pour ca ? Il fallait effectivement passer par le 49-3 pour valider sans vote un tel plan d’enfumage ! Rien d’ailleurs sur l’augmentation des recettes pour financer des politiques de santé publique permettant de répondre aux besoins réels de la population ! Au contraire, le gouvernement perpétue sa politique irresponsable de réduction des soit disants déficits et pousse toujours plus celles et ceux qui le peuvent vers les complémentaires privées. D’ailleurs dans le PLFSS figure sans justification le transfert de 150 millions d’euros des caisses de la sécu aux complémentaires santé !
On est bien loin du 100 % sécu un moment revendiqué par le candidat Macron. Le capitalisme nous coûte cher, il est temps de reprendre notre dû !