Malgré la tentative liberticide du préfet Serge Boulanger, nous avons pleinement pu accompagner les camarades jusqu'au tribunal de Poitiers, après la conférence de presse.
Ci-dessous la prise de parole de Julie Ferrua co-déléguée générale de l'Union syndicale Solidaires

Chers camarades,

Nous sommes rassemblé·es aujourd’hui en soutien à nos camarades qui ont fait appel de leur condamnation à des peines de prisons pour avoir exercé un droit fondamental : celui de s’organiser et de manifester, même quand le gouvernement choisit l'interdiction et l'intimidation. C'est une rupture historique. Pour retrouver des condamnations à la prison de syndicalistes pour le seul motif de s'être mobilisés, il faut remonter à l’époque de Vichy. Ce retour à des pratiques d'un autre âge doit nous alerter sur la dérive autoritaire de l'État.
Notre présence est un acte de solidarité, mais aussi un acte de résistance.
Ce qui se joue ici et aujourd'hui dépasse le cas de nos camarades.
Le pouvoir veut nous faire croire que la répression, c’est seulement la matraque ou la grenade de désencerclement. Bien sûr, nous dénonçons sans relâche la brutalité et la violence policière subie dans les manifestations et dans les quartiers populaires, les mutilations et nous avons de grosses pensées pour notre camarade Sébastien de SUD Rail mutilé pendant les manifs contre la réforme des retraites et pour notre camarade Laurent soignant à AP-HP mutilé pendant la lutte contre la loi travail.
Et nous dénonçons aussi sans relâche la violence inouïe que nous avons vue à Sainte-Soline ou encore plus récemment lors de la lutte contre l’A69. Nous n’oublions pas non plus Rémi Fraisse, 21 ans, tué par une grenade de désencerclement lancée par les forces de l’ordre en 2014 à Sivens.
Mais l’arsenal de l’État est bien plus vaste. Il vise à nous briser, individuellement et collectivement.
Sur les personnes, la pression prend la forme de l'intimidation et de la traque. On place des balises GPS sous les voitures de militant·es écologistes ; on installe du matériel militaire d'écoute ; on lance des convocations et des auditions libres pour « organisation de manifestation interdite » contre nos délégué·es syndicaux, contre des paysan·nes. C’est la mise en garde à vue, les amendes qui visent à épuiser financièrement, les procès qui visent à épuiser psychologiquement. L’objectif est simple : faire peur, isoler, nous décourager d’agir.
Sur nos structures, l’attaque est structurelle. Quand le gouvernement s’empresse de dissoudre Les Soulèvements de la Terre, c’est une attaque contre notre capacité collective à nous organiser. Le Contrat d’engagement républicain, imposé aux associations qui demandent des subventions, est une autre tactique pour nous mettre sous tutelle et nous forcer au silence. Quand la Ligue des Droits de l’Homme est remise en cause, quand nos syndicats (Solidaires, CGT, Confédération Paysanne) sont visés par des convocations pour une simple co-organisation, c’est notre rôle de contre-pouvoir qui est ciblé. L’État tente de criminaliser la solidarité syndicale et associative.
Mais pourquoi tant de violence et de zèle répressif ?
Parce que nos luttes ne sont plus accessoires.
La convergence des luttes sociales et écologiques est devenue le

point de bascule.
Nous l'affirmons : il n’y a pas d’emploi sur une planète morte !
La lutte contre l'accaparement des richesses par le capitalisme ne peut plus être dissociée de la lutte contre l'accaparement des ressources naturelles, comme l'eau. Ce système, fondé sur la croissance infinie, est mortifère.
Le gouvernement et le patronat préfèrent s'attaquer aux résistant·es (celles et ceux qui défendent la biodiversité, l’eau, le climat) plutôt qu’aux pollueurs (les lobbies agro-industriels, les promoteurs des mégabassines). Notre résistance est la seule garantie d'une véritable reconversion écologique de la société.
Un mot sur l'extrême droite : En période de crise, les extrêmes droites se positionnent toujours en roue de secours des capitalistes. Pendant les mobilisations agricoles, elles ont ciblé les normes environnementales en épargnant les multinationales de l'agro-industrie. Elles menacent nos libertés publiques, nos libertés académiques, et la démocratie elle-même. Notre combat pour la justice sociale et environnementale est aussi un combat contre cette offensive.
La répression est la preuve de leur faiblesse et de leur peur face à notre détermination et à la légitimité de nos revendications.
L'illégalité, ce n'était pas la manifestation, ce sont les mégabassines elles-mêmes, que la justice a depuis jugées illégales !
Solidaires dénonce la répression faite à celles et ceux qui se battent pour le bien commun. De Sainte-Soline, au Lyon-Turin, en passant par l’A69 entre Castres et Toulouse et toutes nos luttes communes, nous assumons notre participation aux mobilisations. Les politiques répressives ne pourront ni cacher la crise écologique qui s’accélère, ni nous empêcher de lutter.
Il y a urgence à repenser et changer en profondeur nos modes de production et de consommation, en lien avec les travailleuses et les travailleurs qui doivent pouvoir participer activement à ces transformations. C'est l'écologie syndicale que nous portons.
Alors, quel avenir pour les mobilisations ?
L’avenir est dans la convergence.
L’avenir, c’est nous, debout ou en fauteuil, divers, solidaires.
Nous sommes la terre qui se défend.
Ils peuvent convoquer, dissoudre, surveiller : on n’arrête pas un mouvement, on n’arrête pas une idée arrivée à maturité.
Notre détermination est inébranlable.
Face à la répression, il y aura toujours la résistance.
Solidarité avec nos camarades !
No Bassaran ! La lutte continue !


Pendant que l'audience au tribunal, à l'extérieur une troupe de théâtre rejouait les plaidoiries

Table ronde “Répression et résistances : quel avenir pour les mobilisations sociales et écologiques ?”