L'Union Syndicale Solidaires a été sollicité pour apporter son soutien à une tribune féministe de soutien aux personnes trans. Cette tribune fait suite à l'affiche du planning familial de cet été et à ce qui s'est passé autour. Le revendicatif de cette tribune est conforme au revendicatif voté lors du dernier Congrès.
Cette tribune condamne les discours s’inscrivant dans une offensive réactionnaire et fait le parallèle avec la montée de l'extrême droite. Elle défend une approche matérialiste des questions trans, et lutte contre l'opposition entre féminisme et luttes trans, en rappellant qu'il ne faut pas se tromper d'ennemi.
Suite à la publication par le Planning Familial d’une affiche à destination des hommes trans dans le cadre de leurs grossesses, des militantes s’opposant aux droits des personnes trans au nom du féminisme signaient ce 22 août, une lettre ouverte adressée à la Première ministre, Élisabeth Borne, dans l’hebdomadaire Marianne.
Nous, féministes, refusons cette instrumentalisation des droits des femmes, luttons contre toute opposition entre féminisme et luttes trans et condamnons sans appel ces discours s’inscrivant dans une offensive réactionnaire.
L’utilisation d’arguments fallacieux
Les militant·es anti-trans dénoncent une essentialisation des femmes de la part d’un prétendu « transactivisme », tout en réduisant les femmes à leurs simples organes génitaux. Cette définition contredit la majorité des écrits féministes produits depuis les années 1960. On ne naît pas femme, on le devient. De même, ce que l’on désigne comme le sexe recouvre un ensemble de facteurs qui dépasse la binarité imposée depuis des siècles.
Être une femme ne découle pas de la seule assignation sexuée, mais d’une exploitation qui prend plusieurs formes : économique, domestique, sexuelle. Ainsi, contrairement à ce que prétendent les militant·es anti-trans, les femmes trans sont aussi exposées à ces exploitations et aux violences sexistes et sexuelles. Il n’y a pas de condition universelle de “la femme” mais un ensemble d’expériences diverses selon les positions sociales de chacune.
En faisant reposer leur argumentaire sur la méconnaissance du grand public des luttes et vécus des personnes trans, les militant·es anti-trans diabolisent les parcours de transition. Iels font preuve d’une malhonnêteté intellectuelle jouant notamment sur la peur vis-à-vis des enfants trans. La dysphorie de genre deviendrait alors un trouble mental, les opérations, des mutilations, et le soutien du personnel médical et de la communauté trans, des thérapies de conversion. Comme lors du mariage pour tous, la protection des enfants devient un faux-nez derrière lequel iels se cachent pour peser dans le débat public contre les personnes trans.
Les droits trans sont indissociables des droits des femmes
La période politique actuelle voit un violent retour de bâton s’abattre sur les droits des femmes, alors que le gouvernement français maintient en poste des ministres accusés de viols. Ailleurs dans le monde, le droit à l’avortement est bafoué, en Pologne et aux États-Unis notamment. Avec 89 député·es RN à l'Assemblée nationale, nous ne sommes pas exempts d'une attaque d'une telle ampleur. Il est plus que jamais important de ne pas se tromper de combat.
Aux États-Unis, l'attaque sur le droit à l'avortement a été précédée par de nombreuses lois anti-trans : dans l’Ohio, la loi Save Women’s Sports Act prévoit qu’en cas de doute sur le sexe d’une élève, celle-ci doit subir un examen intrusif pour prouver son sexe. Dans tous ces cas, il s’agit d’une attaque sur le droit des personnes à disposer de leur corps. L’arrivée d’attaques similaires contre les personnes trans en France nous laisse présager un sort semblable à celui des États-Unis.
La vision essentialiste des femmes que promeuvent les militant·es anti-trans est partagée par les théoricien·nes réactionnaires et des masculinismes. Il n’y a pas de surprise à ce que ces deux groupes aient coopéré et que l'extrême droite soit le premier relais des publications anti-trans.
Quelles perspectives pour les mouvements féministes et trans ?
Peu importe que les transitions paraissent incompréhensibles ou abstraites, les personnes trans ne sont pas un exercice de pensée destiné à interroger ce qui définit les rôles masculins et féminins.
La situation politique actuelle oblige le mouvement féministe à se positionner en soutien des revendications des personnes trans. Assister sans prendre parti n'est pas une option. Ne pas se revendiquer anti-trans ne suffit pas, il faut activement exiger avec les trans et avec les féministes, l’émancipation trans.
- Nous revendiquons l'autonomie des parcours de transition, la simplification de l'accès aux procédures administratives, la formation du personnel de santé, l'accès aux soins de transition et le remboursement intégral.
- Nous demandons l'ouverture réelle de la PMA aux personnes trans et la facilitation de la filiation administrative pour les parents trans.
- Nous appelons à une hausse des subventions en faveur des associations venant en aide aux personnes LGBTI pour garantir la pérennité de leurs actions.
- Nous défendons une approche matérialiste des questions trans, c'est-à-dire qui ne soit pas empêtrée dans une approche essentialiste de la féminité, se basant sur les expériences des personnes trans et non sur ce qu'en fantasment les réactionnaires.
- Nous réclamons de la part de la presse et des médias qu’ils prennent leur responsabilité dans la manière dont ils ont de représenter et de diffuser les discours sur les personnes trans.
- Nous exigeons un soutien clair, économique et institutionnel des acteurs politiques aux personnes trans et à leurs droits.
- Nous nous dressons contre l'instrumentalisation par intérêt anti-trans des parcours des lesbiennes et des personnes qui ont détransitionné.
- Nous nous opposons à la discorde que certain·es essayent de pousser entre féminisme et droits trans.
- Nous appelons au soutien actif de toutes les forces se revendiquant du féminisme envers les personnes trans.