Note mensuelle de l'UNIRS de juin 2024

Au sommaire de cette note mensuelle :

  • Positionnement sur l’environnement politique
  • Atténuer la « réforme » des retraites par la CPA
  • Adapter son logement au vieillissement
  • Réunion du CA de l’UNIRS
  • Le « nouveau » COR annonce un déficit des retraites
  • La « prime Macron » pèse sur le déficit de la Sécurité sociale
  • Plus de numérique, pas toujours maîtrisé

Positionnement sur l’environnement politique

L’UNIRS a consacré une demi-journée de son CA à la situation sur la base d’un texte qui est visible sur le site de Solidaires.

Nous avons commencé à dresser deux constats :

1) Le RN est partout, y compris dans les villes où le RN a été et reste « essayé », y compris dans les syndicats où un sondage révèle qu’une personne sur cinq proche de Solidaires vote extrême-droite (et on ne peut pas se réjouir sur le fait que c’est pire dans les autres syndicats).

2) Nous avons échoué dans le combat contre l’extrême-droite. Il faut dénoncer la duplicité du RN, montrer ses votes antisociaux, mais cela ne suffit pas.

La cause de la montée de l’extrême-droite est bien le néolibéralisme, et nous sommes remontés assez loin, dans les années 1970 qui ont vu des coups d’États en Amérique du Sud.

Le capitalisme financier réduit les dépenses sociales et les services publics, augmente les inégalités et la précarité, ce qui a des conséquences dramatiques. Après-guerre, la population vivait d’espoirs, chaque génération pouvait raisonnablement espérer vivre mieux que ses parents. C’est terminé, il n’y a plus d’avenir, c’est le repli sur soi, la haine de l’autre qui parait différent, … et la haine, séduisante et facile, est dangereuse.

Pour l’avenir, nous avons mis en avant trois objectifs :

1) Dans la situation présente marquée par la possible accession au pouvoir de l'extrême droite, nous voyons d’un bon œil le rassemblement large à gauche, bien fragile mais reposant sur un programme qui se tient, qui est positif bien que réformiste et comparable à celui de Joe Biden : un soutien au pouvoir d’achat et aux investissements publics, payé par une fiscalité plus juste avec un impôt sur le revenu plus progressif et un impôt sur la fortune rénové.
Le programme accorde plus de place au social que Biden, par exemple sur la retraite, mais de façon limitée par le cadre budgétaire. D’après les calculs de Jean-Marie Harribey, ce serait un départ en retraite à 62 ans et un calcul de la pension basé sur 42 ans de cotisation (Hollande-Touraine) qui coûterait 1,5 point de PIB, alors que le programme ne prévoit d’y consacrer que 1,25 point de PIB…

2) Un rassemblement syndical large. L’idéal serait de se retrouver à 8, car la population se dit « s’ils arrivent à s’entendre, c’est que c’est important, que l’on doit s’y intéresser et se mobiliser ». Ce rassemblement syndical doit porter un programme d’urgence qui mobilise, car nous avons remarqué pendant les actions retraite que l’extrême-droite n’était plus audible dans les mobilisations.
Pour notre part, 8 organisations de retraités ( le « Groupe des 9 » moins la CGC), a envoyé un communiqué rappelant les revendications et affirmé « il ne saurait y avoir de trêve électorale ni olympique dans le combat pour la paix tout de suite, pour la satisfaction des revendications, contre le racisme, la xénophobie et l’antisémitisme ».

3) Solidaires doit porter une double consigne : « partout, nous combattons l'extrême droite ; pas une voix pour l'extrême droite et ses alliés (LR, Macronistes…) ». Cela représente une position qui ne heurte ni les personnes qui pensent qu’il faut, exceptionnellement faire l’impasse sur la charte d’Amiens, et appeler à voter nouveau Front Populaire, ni celles qui affirment que la gauche au gouvernement nous a toujours trahi, nous trahira encore et alimentera la montée de l’extrême-droite.

En conclusion, nous devons nous préparer à affronter le « monde de la finance » qui va mobiliser toutes ses forces si le programme du Nouveau Front Populaire, même réformiste, arrive au pouvoir. Nous nous rappelons 1981, la fuite des capitaux, les trois dévaluations, … qui ont réussi à imposer un tournant politique de la gauche et l’austérité qui a semé le désespoir et alimenté la montée du RN. Dans le rapport de forces, les actions syndicales doivent peser, et les retraité·es y prendront toute leur place.

Atténuer la « réforme » des retraites par la CPA

L’accord à la SNCF, signé par toutes les organisations syndicales dont SUD-Rail, permet de partir plus tôt à la retraite, voir l’article dans la note du mois dernier, datée du 31 mai.

Maintenant, ce sont les dockers qui veulent partir plus tôt en retraite. La Fédération nationale des ports et docks CGT a appelé à quatre journées de grève entre novembre et février … puis a suspendu l’action après l’ouverture de négociations avec le ministère des Transports … puis a constaté que le gouvernement n’avait l’intention de respecter ses engagements : avant la réforme, les dockers au travail pénible partaient en retraite à 58 ans et E. Macron leur a promis, en avril 2021, que la réforme des retraites ne s’appliquerait pas aux ouvriers dockers et travailleurs portuaires !

Une quinzaine de journée d’actions et de grèves est programmée. À suivre…

Adapter son logement au vieillissement

Le temps de retraite est en moyenne de 26 ans et 85 % espèrent vivre le plus longtemps possible dans leur domicile, mais avec l’âge, un intérieur non fonctionnel peut limiter l’autonomie et accroître les risques d’accident domestique ou de chute.

Pour aménager le logement, il est possible de faire appel à l’Agirc-Arrco, le régime de retraite complémentaire obligatoire des salariés du secteur privé, qui accompagne chaque année, près de 2 millions de personnes pour un budget global de 330 millions d’euros.

L’Agirc-Arrco propose de visiter un appartement témoin, également accessible en visite virtuelle, par exemple à l’Espace Idées Bien chez Moi, au 12 rue Pirandello à Paris qui accueille 6 000 visiteurs par an. Le parcours des différentes pièces de vie montre des solutions simples, efficaces et parfois peu coûteuses pour adapter son logement à l’avancée en âge et favoriser ainsi le maintien à domicile, pour rendre son lieu de vie pratique, confortable et ergonomique.

Cet appartement est aussi un lieu d’informations, de conseil et d’échanges avec des professionnels (ergothérapeutes, juristes, etc.), de conférences (aménagement de l’habitat, sécurité, travaux…), d’ateliers (bricolage, initiation aux gestes de premiers secours…).

Réunion du CA de l’UNIRS

Le Conseil d’administration de l’Unirs s’est réuni le mardi 18 juin et a principalement parlé des conséquences des résultats des élections européennes, des réflexions à mener et les engagements à prendre (voir page 1). Pour voir le texte d’introduction au débat et le débat sur le site de Solidaires, dans le compte-rendu de ce CA.

Situation revendicative chez les personnes retraitées : la réunion du « Groupe des 9 » organisations de retraité·es a souhaité agir sur la santé en s’appuyant sur la résistance locale à l’austérité qui fragilise ou ferme des structures publiques (hôpitaux, EHPAD, etc.). Un questionnaire à remplir par les G9 des départements permettra de construire une action début octobre à partir des réalités.

Le Haut Conseil de l’Âge HCA va travailler sur l’étude commandée par le gouvernement au COR sur les bonifications conjugales et familiales. Les menaces sont réelles, notamment sur la suppression de l’abattement de 10 % pour le calcul de l’impôt sur le revenu, et la remise en cause de la pension de réversion.

Bilan du Congrès de l’Union syndicale Solidaires des 22, 23, 24 et 25 avril 2024 à Toulouse – Labège. L’UNIRS regrette des modifications dans les résolutions qui minimisent la place et les revendications des retraité·es et l’échec de l’amendement qui accordait le droit de vote aux retraité·es qui ne votent pas dans un syndicat de Solidaires. L’UNIRS s’inscrit dans des réflexions sur la politique familiale, la cartographie des implantations, le financement de la sécurité sociale.

Nous travaillerons sur l’interdiction légale de constituer un syndicat de retraité·es, sous le faux prétexte qu’ils ne sont pas salarié·es. Pourtant, il existe des syndicats d’Étudiant·es, de lycéen·es, … pourquoi pas un syndicat de retraité·es ? C’est de l’âgisme ?

Bilan de la réunion européenne de retraité·es, les 23 et 24 mai à Bilbao : voir la note internationale sur le site. Il est décidé de proposer que la prochaine rencontre européenne des retraité·es se passe au local national de Solidaires.

Nous décidons également de revenir sur la situation particulière des travailleurs immigrés retraités en France et sur les politiques menées par les foyers Adoma (Ex Sonacotra), abordées dans les notes mensuelles précédentes.

Dossier revendicatif de l’UNIRS sur la fin de vie : ce dossier n’évoluera plus à cause de la dissolution de l’Assemblée nationale. Il est décidé de le diffuser en l’état, en même temps que le manifeste du Calvados sur l’aide active à mourir. Voir ces deux textes sur le site.

Le « nouveau » COR annonce un déficit des retraites

Le président du Conseil d’orientation des retraites (COR) a été changé par le gouvernement qui a viré celui qui affirmait en pleine réforme des retraites que les comptes des retraites ne dérapaient pas, pour le remplacer par le macroniste Gilbert Cette, grand pourfendeur du Smic, de la protection sociale et du droit du travail. Ce n’est pas le seul changement, le contenu du rapport est plus alarmiste sur l’équilibre des comptes et « à titre personnel » Gilbert Cette propose d’économiser 4 milliards d’euros en supprimant l’abattement de 10 % pour le calcul de l’impôts, dont les retraités continuent à bénéficier pour l’égalité avec les actifs qui peuvent déduire des « frais professionnels ».

Selon le dernier rapport annuel du COR, le système sera en déficit de 5,8 milliards d’euros en 2024, et de 14 milliards en 2030 … comme avant la réforme qui ne change rien à long terme car les personnes qui travaillent plus longtemps auront un peu plus de droits à la retraite. Et le retour à l’équilibre pour 2070 paraît bien loin… Ces évolutions auraient lieu dans un monde où le chômage serait à 5 % en 2030, le taux de fécondité de 1,8 enfant par femme (soit une augmentation par rapport au 1,68 en 2023 !), l’espérance de vie augmenterait et la croissance annuelle de la productivité horaire du travail augmenterait de 1 % à partir de 2030 (soit une accélération non expliquée), l’écart de taux d’activité ne bougerait pas entre les hommes (75,8 %) et les femmes (71,2 %) ce qui signifie maintien des inégalités.

Comme l’affirmait le précédent président du COR, les dépenses de retraite sont maîtrisées, elles n’augmentent plus (au détriment du niveau des pensions…), elles passeraient de 13,4 % du PIB à 13,2 % en 2070. En revanche, la baisse de l’activité économique et l’intention de l’État de diminuer les financements (baisse des cotisations, évolution des salaires dans la fonction publique inférieure à celle des salaires du privé) feraient passer les recettes de 13,6 % à 12,4 % du PIB. Il faudra trouver des ressources, mais le système n’est pas en faillite, le déficit de 2030 correspond à 0,4 % du PIB.

Le COR prédit la poursuite de la baisse du niveau de vie des retraités par rapport à celui des actifs … et avance des remèdes pour l’éviter : « pour ceux qui le peuvent, par un effort accru d’épargne pendant la vie active ; par un report volontaire de l’âge de départ à la retraite ». Dit autrement : les plus aisés doivent capitaliser et les pauvres doivent travailler toujours plus !

Le taux de remplacement net du retraité (la pension par rapport à l’ancien salaire) de la génération 1963 s’élèverait à 82,2 % et diminuerait ensuite pour atteindre 80,5 % pour la génération 1980 et 78,5 % pour la génération 1990.

Les femmes du régime général valident, depuis les générations de fin des années 1950, une durée d’assurance supérieure à celle des hommes … mais leurs pensions (avec les majorations et réversions) sont encore à seulement 75,4 % de celles des hommes en 2021.

Encart

Le paradoxe de la réforme des retraites de 2023 : elle ferait baisser la part des retraites dans le PIB de 13,4 % actuellement à 13,2 % en 2030 … et l’augmenterait à 13,4 % en 2070 parce que « la progression de la pension moyenne [due à des carrières plus longues] viendrait alors plus que compenser le recul de l’âge moyen de départ à la retraite ».

Les experts du COR sont honnêtes, ils avouent qu’ils travaillent sur la base d’un partage de la valeur ajoutée (capital/travail) stable, qu’ils n’ont pas fait tourner leurs modèles sur les ordinateurs en envisageant une répartition de la valeur ajoutée plus favorable au travail. Sur cette base, pour ne pas toucher à la répartition de la valeur ajoutée, l’équilibre des comptes nécessite de baisser les pensions, de reppouser l’âge de départ en retraite ou d’augmenter les cotisations. Gouvernement et patronat refusent de toucher aux cotisations, il ne reste plus que les deux premières, qui ont été imposées dans toutes les « réformes » depuis 1993.

Fin encart

Évolution du niveau de vie

En 2018, le niveau de vie moyen des retraités était légèrement supérieur à celui de l’ensemble de la population (103 %). Avec la politique de Macron, il est désormais inférieur (98,7 %). En 2070, il serait de 83 %.

Pour davantage de détails, voir le blog de Jean-Marie Harribey : https://blogs.alternatives-economiques.fr/harribey, ainsi que les réponses de Michaël Zemmour au journal La Dépèche : https://www.ladepeche.fr/2024/06/17/entretien-reforme-des-retraites-revenir-a-62-ans-cest-possible-et-ca-ne-demande-pas-defforts-demesures-estime-leconomiste-michael-zemmour-12014419.php

La « prime Macron » pèse sur le déficit de la Sécurité sociale

Chaque année, la Cour des comptes se prononce sur les finances de la Sécurité sociale. Cette année, elle s’inquiète du déficit persistant et est particulièrement alarmiste sur la « perte de maîtrise des comptes sociaux (10,5 milliards d’euros de déficit en 2024, 17,2 milliards en 2027) ».

La Cour des comptes ne porte pas des valeurs de gauche, elle pointe le déficit des retraites, dû « principalement » à l’augmentation de 5,3 % des pensions décidée par le gouvernement.

Elle cherche des moyens pour rétablir les comptes.

Pour augmenter les recettes, elle met en cause les exonérations de cotisation des compléments de salaires qui se développent (des chèques-restaurants aux stock-options), et en premier lieu la prime de partage de la valeur (PPV, ex-« prime Macron »). Depuis 2018, ces compléments ont augmenté de 7,8 % par an, contre 4,1 % pour les salaires. Et si la loi oblige l’État à compenser les allégements de charges, ce n’est qu’imparfaitement le cas, regrette la Cour, et ce n’est pas le cas de la PPV.

L’Insee considère qu’en 2022, les rémunérations versées sous forme de primes exceptionnelles se sont substituées à 30 % des augmentations de salaires ! C’est autant de moins dans les caisses de la Sécu.

Au total, la Cour des comptes estime à 8,1 milliards d’euros la perte pour la « Sécu » causée par les compléments de salaires, à comparer aux 6,6 milliards d’augmentation du déficit.

Pour diminuer les dépenses, la Cour énumère quelques mesures et vise les arrêts de travail (+ 4,3 milliards d’euros depuis 2017) : la lutte contre la fraude, contrôle accru sur les médecins, économies sur les indemnités journalières (12 milliards d’euros en 2022), par exemple en passant de 3 à 7 jours de carence (économie de 950 millions)

Plus de numérique, pas toujours maîtrisé

Le Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (Crédoc) a constaté que les équipements et les usages numériques sont « désormais ancrés dans le quotidien de la population », y compris celui des seniors : 64 % des personnes âgées de 70 ans ou plus sont internautes.

La place du numérique en santé a particulièrement augmenté : 38 % prennent rendez-vous en ligne ou téléconsultent, 24% d’entre eux contrôlent leur état de santé grâce au numérique (+16 points par rapport à 2018), 32 % (9% en 2018) transmettent des informations de santé à leur médecin.

Les outils sont mal maitrisées par des personnes âgées et des jeunes (25 % des 12-17 ans).

Pour en savoir plus : https://www.arcom.fr/se-documenter/etudes-et-donnees/etudes-bilans-et-rapports-de-larcom/barometre-du-numerique-edition-2023 et https://www.banquedesterritoires.fr/barometre-du-numerique-2023-une-appropriation-elevee-mais-tres-heterogene?pk_kwd=2024-05-14