Au sommaire de cette note mensuelle :
- Les 9 organisations de retraité·e·s
- Accord Agirc-Arrco et fin du malus
- Les services publics corrigent les inégalités de revenus
- Les partenaires sociaux et les acteurs de la santé contre le PLFSS 2024
- L'inflation réduit la sociabilité
- L’inflation diminue ?
- La pauvreté monétaire
- Les impôts trop chers par rapport à la qualité des services publics rendus
- Le non-recours aux prestations sociales
Les 9 organisations de retraité·e·s
Le G9 a tenu une conférence de presse mardi 17 octobre à la CGT, mais seulement avec l’Humanité et la presse des syndicats CGT et FO. D’habitude, il y a plus de monde.
La réunion des 9 s’est tenue le mercredi 18 octobre dans les locaux de FO. Après échanges et discussions, plusieurs décisions ont été prises :
- Centralisation des informations remontant des équipes départementales quant aux initiatives décidées en commun (manifestations, rassemblements) et quant aux pétitions « papier » collectées. C’est FO (Paul Barbier) qui effectue cette centralisation, et chaque organisation lui fait parvenir ses propres informations reçues.
- En ce qui concerne le rassemblement à Paris, au métro Varenne (à proximité de Matignon), c’est la CGT (Jean-Pierre Lalbat) qui rédige le texte qui sera lu par un ou une représentant·e des 9 au nom des 9.
- Pour l’audience demandée à Matignon, chaque organisation indique à la CGT (Jean-Pierre Lalbat) le nom de la personne qui fera partie de la délégation (une personne par organisation).
- Au lendemain du 24 octobre, un communiqué « offensif » sera rédigé et envoyé et c’est FO (Paul Barbier) qui rédigera le projet.
- Un courrier va être envoyé aux associations avec lesquelles nous travaillons au sein du Haut Conseil de l’Âge (HCA) pour leur proposer une initiative commune pour s’opposer au PLFSS 2024. C’est la FGR-FP (Jacques Fogliarini) qui envoie une proposition.
- Un communiqué de presse du G9 va être rédigé pour mettre en avant nos analyses et nos critiques sur le PLFSS 2024. C’est la FSU qui rédige le projet (Marylène Cahouet).
- Un nouveau document va être rédigé pour dénoncer les mensonges du gouvernement et de celles et ceux qui le servent, sur la situation qui serait celle des personnes retraitées. Une nouvelle fois, le gouvernement prépare des attaques contre les personnes à la retraite en disant qu’elles sont favorisées dans notre société. C’est la CGT (Jean-Pierre Lalbat) qui rédige le projet.
- Un document à destination des équipes dans les départements va être mis au point pour expliquer ce qu’est la CNSA, créée après 2003 et l’épisode de la canicule et qui, désormais, gère la 5e branche de la sécurité sociale (branche Autonomie) où les organisations syndicales sont ultra minoritaires. Cette gestion, où les organismes privés lucratifs sont fortement présents, est un peu le cheval de Troie des intérêts financiers dans la Sécurité sociale. C’est FO qui fait un projet (Didier Hotte).
Par ailleurs, il est retenu de réfléchir sur les mensonges du gouvernement dans son PLFSS 2024 où il affirme se préoccuper de la santé de la population alors qu’il budgétise des crédits en baisse dans pratiquement tous les domaines en les revalorisant nettement moins que l’inflation officielle. Après le 24 octobre, nos combats devront porter sur ce PLFSS 2024.
Prochaine réunion : lundi 13 novembre 2023, à 14 heures, dans les locaux de la FSU.
L’inflation diminue ?
C’est ce que prétend le gouvernement pour tenter de justifier la faible revalorisation des pensions et des minima sociaux.
Pourtant, l'augmentation de la base nationale de l'imposition foncière est de 7,1%, tout comme l'évolution des prix à la location.
Pourtant, les complémentaires santé envisagent des hausses de tarifs entre 8 % et 12,5 % et coûteraient plus de 250 € par mois à un couple de 60 ans, et plus de 300 € pour les couples de 70 ans, à comparer aux 100 € par mois pour un couple de 30 ans avec deux enfants. Les complémentaires justifient ces hausses par une augmentation des dépenses de 1 milliard à 1,5 milliard d’euros :
- envol des dépenses de santé de 7 % au lieu de l’inhabituel 2 à 3 %,
- augmentation des « transferts de charge massifs » de l’État,
- hausse du ticket modérateur pris en charge par les complémentaires pour les soins bucco-dentaires, annoncée par le gouvernement en juin, passant de 30 % à 40 % (coût : 500 millions d’euros),
- augmentation tendancielle des dépenses liées au vieillissement, au développement des maladies chroniques et au progrès médical,
- montée en puissance du dispositif du « 100 % santé », soit la prise en charge totale de certains soins visuels, dentaires et optiques.
Accord Agirc-Arrco et fin du malus
Enfin ! Le régime de retraite complémentaire des salarié·e·s va mettre fin, au 1er décembre 2023, au malus de 10 % qui diminuait, pendant 3 ans, la pension de celles et ceux qui partaient en retraite avant 63 ans. Les personnes actuellement en retraite ne verront la disparition de leur ponction de 10 % que le 1er avril 2024.
Cette pénalisation financière n’a pas modifié les comportements, la moitié des retraité·e·s ont refusé de repousser leur départ et ont donc subi le malus. Seulement 8 % sont partis un an plus tard, et 2 % encore plus tard pour avoir un bonus. Mais l’Agirc-Arrco a ainsi économisé 500 millions d’euros par an.
L’accord incite au cumul emploi-retraite, qui concerne actuellement 300 000 personnes, qui va permettre d’acquérir de nouveaux droits, comme le veut le gouvernement. À partir du 1er janvier 2024, les cotisations sur les salaires jusqu’à 3 666 euros brut génèreront des points Agirc-Arrco qui pourront être liquidés à partir du 1er janvier 2024. Les syndicats auraient préféré que cet argent attribué aux « cumulard·e·s » serve à la revalorisation générale des pensions.
La revalorisation annuelle des pensions ne sera que de 4,9 % au 1er novembre, soit moins que celle de la retraite de base à 5,2 % au 1er janvier 2024, elle-même inférieure à l’inflation. Et les trois années suivantes, la revalorisation sera égale à l’inflation hors tabac moins 0,4 point.
Les revalorisations inférieures en permanence à l’inflation sont la conséquence du refus d’augmenter les cotisations, de l’obligation d’équilibrer les comptes alors que le nombre de retraité·e·s augmente. Elles diminuent le taux de remplacement (la pension par rapport à l’ancien salaire). Elles ont permis des réserves financières correspondant à 10 mois de prestations (au lieu de l’obligation de 6 mois).
Fin 2022, les réserves s’élevaient à 69 milliards d’euros et devraient augmenter de 22 milliards d’euros d’économies supplémentaires sur les quinze prochaines années avec les effets de la réforme des retraites. Le ministre du Travail, Olivier Dussopt, veut prendre à l’Agirc-Arrco de 1 à 1,2 milliard d’euros par an jusqu’en 2026 puis 3 milliards ensuite, pour « financer un certain nombre d’avancées, notamment au relèvement des petites pensions ». Pour ne pas se faire voler ces milliards par un article dans le PLFSS 2024 qui passera au 49.3, l’Agirc-Arrco mettra en place un groupe de travail d’ici la fin du premier semestre 2024 « chargé de définir des dispositifs de solidarité en direction des allocataires du régime Agirc-Arrco, articulés avec les dispositifs déjà existants au sein du régime » … ce qui ne suffit pas au ministre qui regrette le choix d’augmenter le niveau des retraite de toutes et tous, de refuser d'aider à combler les déficits du régime de retraite général et qui affirme que « cette décision met en péril l’équilibre de la réforme et la crédibilité de nos finances publiques ».
Tous les membres de l’Agirc-Arrco (organisations syndicales et patronales) refusent ce vol. Après l’impopularité de la réforme des retraites, le gouvernement prendra-t-il le risque de se mettre à dos une nouvelle fois la population ? Il ne peut pas compter sur la droite qui dit déjà que « le gouvernement ne peut indûment ponctionner le fruit des cotisations des salariés du privé ».
L’accord s’appliquera avec les signatures CFDT, CFTC, FO, CGC et du Medef, malgré le refus des organisations patronales U2P et CPME et l’attente de la CGT qui consulte ses rangs sur la signature.
Les services publics corrigent les inégalités de revenus
L’Insee a étudié le rôle des services publics dans la réduction des inégalités de revenu (voir l’étude en cliquant https://www.insee.fr/fr/statistiques/5371275?sommaire=5371304) : 57 % de la population sont des « bénéficiaires nets » des mécanismes de redistribution, voient leur niveau de vie s’améliorer et touchent plus qu’ils ne versent à la collectivité. Ils sont même plus de 95 % parmi les 15 % les plus modestes, contre seulement 13 % parmi les 5 % les plus aisés.
Cette redistribution divise par six les inégalités de revenus entre les 10 % des ménages les plus aisés et les 13 % les plus pauvres :
- Avant redistribution, avec 130 000 euros de revenus par an, les plus riches touchent près de 18 fois plus que les 6 980 euros de revenus versés aux plus pauvres.
- Après la prise en compte des transferts sociaux, cet écart passe à 3, avec 78 480 euros contre 25 330 euros.
Pour calculer cet écart, il est tenu compte de ce que donnent les ménages, impôts, taxes et cotisations, et de qu’ils reçoivent : la valorisation monétaire des services publics contribue pour plus de la moitié (+ 53 %) à la réduction des inégalités du fait des dépenses de santé et d’éducation, puis les prestations sociales monétaires pour 40 %. L’ensemble des transferts, monétaires et en nature, représente un peu plus de 500 milliards d’euros (25 % du revenu national net en 2019).
Les plus de 60 ans (29 % de la population) sont les grands gagnants du fait du système de retraite par répartition et des dépenses de santé (ils en reçoivent 61 %).
Les services publics réduisent les inégalités, mais, depuis 20 ans, leurs moyens augmentent moins rapidement que les besoins sociaux. Et le gouvernement annonce, dans son budget 2024, une nouvelle cure d’austérité pour les dépenses publiques.
Les partenaires sociaux et les acteurs de la santé contre le PLFSS 2024
Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2024 a été discuté dans les conseils d’administration ou conseils des caisses nationales de Sécurité sociale. Les votes sont majoritairement défavorables :
- Cnaf : 17 voix contre, 11 abstentions et 6 prises d’acte
- Cnav : 16 voix contre, 8 absentions, 6 prises d'acte
- Cnam : 22 voix contre, 8 abstentions et 5 prises d’acte
- Uncam : 10 voix contre, 4 abstentions, 3 favorables et une prise d’acte
- CNSA : 13 voix contre, 4 pour, 18 prises d’acte
- Commission des accidents du travail et maladies professionnelles (CATMP) : 6 voix contre
- Conseil de la protection sociale des travailleurs indépendants (CPSTI) : 9 voix contre et 13 prises d’acte
- MSA : vote défavorable
- Urssaf :18 votes contre, 6 prises d’acte, 1 abstention
Parmi les éléments qui ont suscité ces votes défavorables, figurent notamment les transferts financiers au sein des administrations de Sécurité sociale et avec le budget de l’État, notamment en ce qui concerne l’Unédic et l’Agirc-Arrco.
Mais le PLFSS 2024 passera à l’Assemblée nationale avec le 49.3.
Les acteurs de la santé ont immédiatement réagi au PLFSS et exprimé leur déception quant au niveau des taux d'Ondam.
Pour les fédérations hospitalières (FHF, FHP, Fehap, Fnehad et Unicancer), le niveau d’inflation a été notoirement sous-évalué. Elles réclament une révision urgente de l’objectif hospitalier à hauteur d’1,5 milliard d’euros. Pour la Fédération française des masseurs-kinésithérapeutes (FFMKR), le taux de l’Ondam (+ 3,2%) est insuffisant. Le Syndicat national de l’industrie des technologies médicales (Snitem) est très réservé sur la capacité du secteur à économiser 150 millions d’euros comme cela lui est demandé.
L'inflation réduit la sociabilité
C’est l’avis du Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (Crédoc). Son étude (à consulter ici : https://www.credoc.fr/publications/les-effets-de-linflation-sur-la-sociabilite-des-francais) montre que :
- 70 % des personnes interrogées limitent les occasions de rencontres et de sorties loisirs à l’extérieur avec des proches, pour éviter les dépenses,
- 50 % des personnes ont limité à la fois les sorties à l’extérieur et les invitations chez elles.
- 33 % ont potentiellement basculé du fait de l’inflation dans une forme de « déliaison ».
Ces restrictions concernent en particulier les femmes, les personnes aux bas revenus et les classes moyennes inférieures. Les familles nombreuses ou les foyers monoparentaux sont également particulièrement concernés, ainsi que les personnes séparées/divorcées.
La hausse des prix suscite des tensions dans un quart des foyers, les plus modestes déclarent davantage être concernés (bas revenus, moins de 25 ans, non diplômés, chômeurs). Les personnes interrogées sont partagées sur les aides des pouvoirs publics à privilégier, en nature (48%) ou financières (51%). Celles contraintes de se limiter dans leur sociabilité déclarent plus souvent privilégier des aides financières exceptionnelles, leur permettant de choisir la nature des dépenses.
La pauvreté monétaire
Selon l’étude de l’Insee (à lire ici : https://www.insee.fr/fr/statistiques/7672092#onglet-2), parmi les 9 millions de personnes en situation de pauvreté monétaire en France métropolitaine, 27,3 % sont à la retraite et résident majoritairement en milieu rural. Elles vivent avec moins de 1 120 euros par mois pour une personne seule et 1 680 euros pour un couple sans enfant.
Néanmoins, les retraités pauvres ont un niveau de vie médian plus élevé (945 euros mensuels) que la moyenne des pauvres. Leur revenu disponible repose à hauteur de 79 % sur les pensions, retraites et rentes, et 40 % d’entre eux sont propriétaires et donc sans loyer à payer.
Les retraités pauvres résident également plus fréquemment dans une commune rurale, à 36 %, avec 20 % d’entre eux vivant dans une commune rurale non périurbaine. Les ménages retraités pauvres à l’ouest et au sud du Massif central ainsi qu’en Corse sont surreprésentés du fait de la forte présence de personnes de 65 ans ou plus dans ces territoires.
Pourcentage de ménages retraités parmi les ménages pauvres
Les impôts trop chers par rapport à la qualité des services publics rendus
Un sondage Ifop, à consulter en cliquant ici https://www.ifop.com/publication/le-regard-des-francais-sur-les-impots-au-regard-des-services-publics-rendus/, montre qu’une majorité de la population (66 %) estime que le montant des impôts est trop élevé par rapport à l’efficacité des services publics ainsi financés. Les plus critiques sont les 35-64 ans (72 %), les artisans et commerçants (88 %), les cadres (74 %) et les habitant·e·s de banlieue au niveau de vie supérieur (84 %). Seulement 30 % se déclarent satisfait·e·s de la qualité des services publics payés par leurs impôts et taxes.
Le mécontentement face à la qualité des services publics concerne 59 % en général et bien plus pour l’hôpital (81 % estiment que cela s’est dégradé), l’éducation (74 %), la sécurité (68 %), la justice (67 %), les transports (57 %). Le sentiment d’une dégradation est plus important chez les 35 ans et plus.
Que devraient financer en priorité impôts et cotisations ? Arrivent en tête l’assurance maladie et la santé (pour 54 % en moyenne mais 65 % chez les sénior·e·s) et l’éducation (pour 46 %). Viennent ensuite la sécurité et la défense (30 %), les retraites (28 %) et l’environnement (23 % en moyenne mais 40 % pour les 18-24 ans). Le remboursement de la dette publique n’arrive qu’en huitième position avec 14 %, loin dans le classement des priorités.
La stratégie libérale des gouvernements ne change pas et fait des ravages : dégradation des services publics, matraquage idéologique sur le trop d’impôts, baisse des recettes fiscales justifiant des économies dans les services publics…
Le non-recours aux prestations sociales
La direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) observe une diminution du recours aux prestations sociales. Le taux de non-recours peut dépasser 30 %, il s’élève à 50 % pour le minimum vieillesse (Aspa) pour une personne seule et à 34 % pour le revenu de solidarité active (RSA).
Sur neuf prestations sociales citées, seulement 51 % des personnes interrogées en 2020 ont entendu parler d’au moins sept d’entre elles contre 63 % en 2016, et 28 % n’en connaissent aucune assez précisément, contre 17 % en 2016. Les allocations familiales, les aides au logement et le revenu de solidarité active (RSA) sont toujours très largement connus. Seulement 40 % (50 % en 2016) ont entendu parler de l’allocation des personnes âgées en perte d’autonomie (APA).
Par rapport aux 35-49 ans, les personnes âgées de plus de 64 ans connaissent davantage le minimum vieillesse Aspa (+11,2 points) et l’Allocation à la Perte d’Autonomie APA (+7,8 points).
Quelle est la cause du non-recours ?
C’est le manque d’information sur les aides pour 39 %, mais cette cause diminue, c’était 56 % en 2016. Une deuxième cause prend de plus en plus d’ampleur, la complexité et la longueur des démarches pour 23 %. Viennent ensuite la crainte des conséquences négatives (18 %, bien plus que les 8 % en 2016) et le souhait de s’en sortir soi-même sans dépendre de l’aide sociale ou de ne pas être considéré·e comme un·e assisté·e (16 %, à comparer aux 10 % de 2016).
Pour voir l’étude de la Drees, cliquer ici https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/sites/default/files/2023-04/ER1263.pdf