Lors du vote de la loi contre les appels sortants émis par les centres d’appels, un député a expliqué à l’assemblée nationale que « des dizaines de milliers de salariés, principalement des femmes et des jeunes subissent un environnement de travail oppressant et précaire. La cadence infernale - jusqu’à des centaines d’appels par jour -, la surveillance permanente, les objectifs inatteignables et le caractère inadapté des postes de travail sont autant de facteurs de stress d’épuisement nerveux et de troubles musculosquelettiques » puis à ajouter « Cette réalité accroît l’insécurité de l’emploi, avec un turnover très élevé et des salaires qui dépassent à peine le smic. Les risques psycho-sociaux sont connus et documentés » et enfin a conclu sur « Face à ce constat alarmant, il est impératif d’évaluer précisément la pénibilité de ces métiers et les facteurs de risques professionnels, y compris psycho-sociaux, qui y sont associés ».
Si nous pouvons nous reconnaître dans l’analyse, nous ne comptions évidemment pas sur les politiques pour faire l’évaluation de quoi que ce soit ! Nous avons donc décidé de lancer une enquête sur la santé au travail dans les centres d’appels puisque nous en avions réalisé en 2009 et 2013. Pour réussir une telle enquête, nous nous sommes d’abord interrogés sur les objectifs qui permettrait de donner de la valeur à ce travail de terrain. Malheureusement, il est difficile d’établir précisément le nombre de salarié-es du secteur puisque chaque jour leur nombre change vu le fort taux de turn over. A cela s’ajoute la complexité de la tâche de s’adresser à des salarié-es rarement présent en même temps entre les absences, les congés, le télétravail ou les horaires du soir… Nous avons donc fait le choix de couvrir le plus grand nombre de sites de production pour diversifier les réponses entre petite et grande entreprise, multinationales, TPE ou SCOP…
Nous avons construit un questionnaire en partant de ce que nous avions réalisé et en y incluant par exemple la question du télétravail ou l’IA. Parallèlement à cela, les négociations de branche nous ont incité à multiplier l’enquête sur plusieurs secteurs comme les hôtes-ses d’accueil, le coworking, le recouvrement ou les centres de back-office. Ce qui nous a amené à multiplier les rencontres devant les entreprises…
À ce jour dans les centres d’appels, nous approchons les 3000 réponses (entre 5 et 10% des salarié-es du secteur de la sous-traitance) issues de plus 120 sites différents allant de 1500 salarié-es à moins d’une dizaine ! Ce tour de France du secteur, nous a permis de constater les dégâts provoqués par les lois successives sur les appels sortants. D’un point de vue militant, nous avons pu discuter avec des milliers de salarié-es afin de mieux appréhender leurs attentes, leurs revendications, mais aussi répondre à leurs interrogations. Nous avons aussi pu discuter en interne de comment mener une telle enquête, de notre travail quotidien et voir là où nous étions en difficulté. Des dizaines de contacts ont été pris et nous avons aussi créé quelques sections qui devraient nous permettre d’effectuer plus facilement la suite de cette campagne.
En effet ce n’est pas fini, puisque fin janvier nous organisons un colloque sur la santé au travail dans la relation client afin de restituer les résultats, mais aussi de nous former sur quelques questions que nous avons rencontré pendant la campagne. A partir des débats de ce colloque et des résultats, nous proposerons une série de revendications afin que le secteur et son absentéisme à plus de 15% de moyenne se porte mieux ! Enfin, nous allons repartir sur le terrain pour diffuser les résultats et surtout proposer des tables rondes afin de discuter des résultats avec les politiques, les donneurs d’ordres et les patrons du secteur. Chacun devra prendre ses responsabilités entre le monde économique et politique, mais nous espérons que notre enquête oblige tout le monde à avancer !