Après avoir participé à un stage d'autodéfense féministe, la journaliste Mathilde Blézat a voulu recueillir les témoignages d'autres participantes à cet outil de prévention primaire des violences sexistes et sexuelles, pour vérifier si « à elles aussi, ça a changé leur vie ».
Avant cela, elle commence par revenir sur l'histoire de cette pratique qui est apparue au début du XXe siècle en Angleterre avec les Suffragettes, qui apprirent des techniques d'arts martiaux pour se défendre contre les violences policières et machistes qu'elles pouvaient subir durant leurs actions de revendication pour le droit de vote des femmes. Bousculant les normes de genre, ces pratiques d'autodéfense tombèrent peu à peu dans l'oubli pour ressurgir dans les années 1970 aux USA.
L'autodéfense féministe n'est pas un sport de combat mais « une pratique de prévention primaire centrée sur l'autonomie et le choix des personnes ». Il s'agit de « se donner le droit, la légitimité à se défendre ». Mathilde Blézat discute de posture, regard, riposte verbale, fuite. Elle nous rappelle que « l'immense majorité des agressions faites aux femmes sont le fait de personnes que connait la victime », que l'autodéfense féministe « porte un regard profondément critique sur les politiques sécuritaires ». Elle souligne que les pratiques d'autodéfense féministe « cherchent à autonomiser les femmes et renforcer leur confiance en elles ».
L'autrice propose un certain nombre de témoignages, dont des vécus de stages, et discute, entre autres, de cadres d'échange, de collectif, de la notion de « vulnérabilité », de blocages mentaux, d'interdits sociaux, de confiance en soi, de ressources cachées, de visibilité, de femmes handicapées, de dépendance organisée, d'émotions, de gestuelle du corps, d'impact du racisme sur la santé mentale et le corps, de la diversité de l'« être femme », de domination masculine et de continuum de violence.
Avant et après. L'autodéfense féministe a comme effet, un « déclic mental », un sentiment « d'être à la fois en droit et capable de se défendre face aux agressions, d'être puissante et entourée », une brèche dans la peur inculquée dès la petite enfance aux filles, dans une socialisation dévalorisante (dont « de culpabilisation des victimes et de disculpation des agresseurs »), une fissure dans l'imaginaire de vulnérabilité, un pouvoir d'agir, une autre vision du corps (« son corps n'est pas seulement « un fardeau », mais aussi « une arme »), un rapport nouveau à la violence et à l'usage de celle-ci, « elle n'est pas une prise de pouvoir sur l'autre, elle est différente de la violence typiquement masculine »…
Contre le déni de riposte, reprendre du pouvoir sur les vécus.
L'autrice insiste sur les dimensions collectives, la sororité, la création d'un nouvel imaginaire collectif qui brise l'isolement, les transmissions de savoirs, la présence dans le monde et l'agir au-delà de soi…