Fiche N° 27 – La vidéo-surveillance

Les environnements de travail sont de plus en plus équipés de dispositifs de vidéosurveillance. S’ils sont légitimes pour assurer la sécurité des biens et des personnes, de tels outils ne peuvent pas conduire à placer les employé·e·s sous surveillance constante et permanente. Chaque salarié·e doit être informé·e individuellement de l’existence ou mise en place de la vidéosurveillance (avenant au contrat de travail, note de service, par exemple). Quelles règles les employeurs doivent-ils respecter ? Quels sont les droits des employé·e·s ?


La direction peut installer la vidéosurveillance pour surveiller les salarié·e·s ?

Non ! La vidéosurveillance ne peut être installée sur un lieu de travail qu’à des fins de sécurité des biens et des personnes à titre dissuasif ou pour identifier les auteurs de vols, de dégradations ou d’agressions.

Les caméras peuvent être installées au niveau des entrées et sorties des bâtiments, des issues de secours et des voies de circulation. Elles peuvent aussi filmer les zones où sont entreposés de la marchandise ou des biens de valeur.

Elles ne doivent pas filmer les salarié·e·s sur leur poste de travail (sauf circonstances particulières : salarié·e manipulant de l’argent, mais la caméra doit davantage filmer la caisse que le/la caissier·e).

Les caméras ne doivent pas filmer les lieux de pause ou de repos, les toilettes ou les locaux syndicaux. Si des dégradations sont commises sur les distributeurs alimentaires par exemple, les caméras ne doivent filmer que les distributeurs, et non toute la pièce.

Sur le lieu de travail comme ailleurs, les salarié·e·s ont droit au respect de leur vie privée.

Quelles sont les formalités avant la mise en place de la vidéosurveillance ?

S’il s’agit d’un lieu non ouvert au public (lieux de stockage, réserves, zones dédiées au personnel), aucune déclaration n’est nécessaire auprès de la CNIL. Le règlement général de protection des données (RGPD), entré en vigueur en mai 2018, prévoit seulement un « système d’autocontrôle » de la part des entreprises, qui consiste à inscrire le dispositif de vidéosurveillance à leur registre de traitement des données personnelles.

S’il s’agit d’un lieu ouvert au public, le dispositif doit faire l’objet d’une demande d’autorisation auprès de la préfecture du département et être autorisé par celle-ci avant toute mise en place.

Le comité social économique (CSE) doit être consulté avant toute décision d’installer des caméras.

Qui peut visionner les images ?

Seules les personnes habilitées par l’employeur, désignées au moment de la déclaration à la CNIL ou de la demande d’autorisation à la préfecture, et dans le cadre de leurs fonctions, peuvent visionner les images enregistrées (le responsable de la sécurité de l’entreprise, par exemple).

Puis-je être filmé·e à mon insu ? Et quelle information doit-elle être faite ?

Non, on ne peut pas être filmé·e à son insu. Par ailleurs, les locaux placés sous vidéosurveillance doivent être dotés de panneaux affichés en permanence, de façon visible, qui comportent à minima, outre le pictogramme d’une caméra indiquant que le lieu est placé sous vidéosurveillance :

  • les finalités du traitement installé ;
  • la durée de conservation des images ;
  • le nom ou la qualité et le numéro de téléphone du responsable à la protection des données (DPO) ;
  • la procédure à suivre pour permettre de demander l’accès aux enregistrements visuels vous concernant ;
  • l’existence de droits « Informatique et Libertés » ;
  • le droit d’introduire une réclamation auprès de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), en précisant ses coordonnées.

Combien de temps sont archivées les images ?

L’employeur doit définir la durée de conservation des images. En principe, celle-ci n’excède pas un mois. En règle générale, conserver les images quelques jours suffit à effectuer les vérifications nécessaires en cas d’incident, et permet d’enclencher d’éventuelles procédures disciplinaires ou pénales. Si de telles procédures sont engagées, les images sont alors extraites du dispositif (après consignation de cette opération dans un cahier spécifique) et conservées pour la durée de la procédure.

Quelles missions pour les instances représentatives du personnel ?

Les IRP ont un rôle consultatif : avant toute décision d’installation ou de modification de caméras, les élus au CSE doivent être consultés (avec la possibilité de désigner un expert sur la pertinence de cette installation). Dans ce cadre, les élus doivent poser un maximum de questions précises.

Les IRP ont également un rôle de contrôle :

  • Si les caméras ont été installées, ils doivent vérifier l’orientation des caméras, l’existence de la demande d’autorisation à la préfecture (que l’employeur obtient bien souvent sans souci) et l’existence des affiches de signalisation de la vidéosurveillance de manière réglementaire.
  • Si la Direction a l’intention de mettre en place la vidéosurveillance, ils doivent en informer les salarié·e·s, et vérifier que la procédure d’installation se fait conformément à la législation.
  • Un·e salarié·e ne peut être sanctionné·e avec la vidéosurveillance comme preuve, si le processus réglementaire n’a pas été appliqué au moment de son installation, ou si la vidéo provient d’une autre entreprise que celle du/de la salarié·e.

Et si la Direction ne respecte pas les procédures ?

Vous pouvez saisir :

  • le service des plaintes de la CNIL. La CNIL peut contrôler tous les dispositifs installés sur le territoire national, qu’ils filment des lieux fermés ou ouverts au public ;
    Informations : 01 53 73 22 22
    Par courrier : CNIL 3 place de Fontenoy – TSA 80715 – 75334 Paris cedex 07
    Par Internet sur cnil.fr/plaintes
  • les services de l’Inspection du travail de votre département (numéro affiché dans le cadre obligatoire de votre entreprise) ;
  • les services de la préfecture, si les caméras filment les abords de l’établissement ;
  • les services de police ou de gendarmerie ;
  • le procureur de la République.

Quels sont les textes de référence ?

  • Le règlement sur la protection des données personnelles (RGPD)
  • La loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés
  • Le code de la sécurité intérieure
    • articles L.223-1 et suivants (lutte contre le terrorisme)
    • articles L.251-1 et suivants, lorsque les caméras filment des lieux ouverts au public.
  • Le code du travail
    article L.1121-1 (principe de proportionnalité)
    • articles L.1221-9 et L.1222-4 (information individuelle des salariés)
    • article L.2312-38
    • article L.2323-32 (information/consultation des instances représentatives du personnel)
  • Le code civil 
    article 9 (protection de la vie privée)
  • Le code pénal
    article 226-1 (enregistrement de l’image d’une personne à son insu dans un lieu privé)
    article 226-16 (défaut de déclaration auprès de la CNIL)
    article 226-18 (collecte déloyale ou illicite)
    article 226-20 (durée de conservation excessive)
    article 226-21 (détournement de la finalité du dispositif)
    article R.625-10 (absence d’information des personnes)